ou Comment produire un drone métallique d’un autre monde
ou Comment produire un drone métallique d’un autre monde
L’emploi des baguettes superball (parfois appelées « flumi », « flumey », « floomy », « rubbing mallets » ou « friction mallets ») permet d’étendre considérablement les possibilités de jeu sur les gongs, car leur mode de jeu principal est la friction et non la percussion, contrairement aux baguettes de percussion standards. Elles sont composées d’un manche, de préférence flexible, au bout duquel se trouve la tête, composée d’une balle en caoutchouc. En frictionnant la tête sur n’importe quelle surface, la tête subit des micro-rebonds, qui se traduisent pas une mise en vibration de la surface ou de l’instrument.
Pour en savoir plus sur l’histoire des baguettes superball, je vous suggère de lire la page consacrée à ce sujet sur le site officiel du Waterphone (la page semble désormais ne plus exister depuis la refonte du site).
Bien que les « Emil Richards Super Rub » superball mallets éditées par Mike Balter constituent déjà un bon point de départ, à ma connaissance, les meilleures baguettes superball sont éditées par TTE Konklang, qui produit 9 diamètres différents dans plusieurs collections, ainsi qu’une innovation très intéressante : la poignée stabilisatrice de partiels Vario OTG 5 (pour « Vario OverTone Generator »), qui peut être attachée au manche de ces baguettes, et permet de régler la longueur entre la poignée et la tête, détail important comme nous le verrons plus loin.
Dans la mesure où les baguettes superball peuvent laisser une trace sur la surface contre laquelle elles se frictionnent, il est préférable de les utiliser au dos des gongs.
Avant tout, la forme du tracé a un impact sur le son produit : les tracés courts sur l’aire rehaussée, qu’ils soient droits ou en zigzags, produisent des rugissements ou des gémissements ; les tracés réguliers circulaires, sur l’anneau brûlé à l’extérieur de l’aire rehaussée (ou à la limite sur l’anneau arc-en-ciel entre l’aire rehaussée et l’anneau brûlé) permettent d’entretenir le son ad libitum, en laissant les partiels s’exprimer (certains prennent du temps à se manifester) et se développer. Ils produisent des sortes de drones métalliques, qui évoluent parfois vers des nuages de partiels plus ou moins stables. Les sons sont purs pour certains, d’autres font entendre des battements très puissants, d’autres encore sont littéralement des accords, voire des multiphoniques. Il arrive que le son commence pur, puis laisse entendre des battements, puis s’enrichisse de partiels secondaires pour former un accord, puis fasse entendre une note plus grave ou évolue vers un autre partiel. En jeu circulaire régulier, il n’est pas toujours nécessaire d’entretenir le tracé en boucle (ce qui est très fatiguant) : il peut suffire de relancer le son régulièrement en effectuant un tracé circulaire partiel, tant que le gong résonne encore. En rapprochant l’intervalle de relance, le son devient de plus en plus fort, alors qu’en espaçant les relances, le son diminue.
Comme au Waterphone en jouant avec archet sur les tiges, une fois qu’un partiel sonne, il peut être difficile de changer de partiel et de faire passer le gong sur d’autres modes de vibration tant que toutes les résonances (même résiduelles) ne se sont pas dissipées.
Il y a au moins cinq paramètres qui influent sur la hauteur des sons produits :
Quelques formules empiriques :
Les cinq paramètres dont nous avons parlé plus haut se combinent pour créer une infinité de contextes, qu’il est possible de moduler en cours de jeu pour transformer le son. Toutefois, il y a des résultats plus ou moins optimaux : une grosse baguette est plus adaptée à un grand gong, contrairement aux petites baguettes qui sont difficiles à manier, voire inutiles sur un tel gong. À l’inverse, un gong de petit diamètre se prête mieux aux baguettes moyennes et petites.
Sur un gong de grande taille, le son a plus de potentiel dans les graves et un ambitus plus large, même vers l’aigu. Sur un petit gong, il peut tout de même y avoir des graves, mais assez étouffés et confus, avec peu de projection, et le son peut forcer voire saturer plus rapidement. Toutefois, entre deux gongs, le gong le plus petit peut quand même avoir un son plus grave (mais avec moins de projection) que le gong le plus grand, si l’épaisseur du petit gong (donc la tension de sa surface) est moins importante que celle du grand gong.
Par ailleurs, comme pour le jeu normal par mailloches, le diamètre du gong a une incidence sur la projection du son : plus le diamètre du gong est important, meilleure est la projection. L’épaisseur aussi a son importance : à diamètre égal, un gong plus épais a plus de projection, aux dépens de la réactivité.
Indépendamment de toutes ces considérations, les baguettes à large diamètre sonnent plus facilement et mettent le gong en vibration plus rapidement, alors que les toutes petites baguettes mettent du temps avant de sonner et sont plus difficiles, voire produisent d’abord du son sporadiquement pendant une certaine durée, le temps de mettre en vibration le gong. Par ailleurs, les plus grosses baguettes superball produisent des vibrations si intenses (surtout sur les gros gongs) que les doigts, la main et le poignet sont soumis à un véritable massage ! Pour cette raison, il n’est pas possible de jouer longtemps.
Les partiels obtenus sont relativement prévisibles lorsque la poignée est attachée juste en dessous de la tête. Dès que la longueur de baguette augmente, ou bien en n’utilisant pas la poignée Vario OTG 5, les partiels deviennent moins prévisibles et moins reproductibles, et chaque paramètre prend plus d’importance dans l’équilibre alors précaire du son.
En plus de jouer avec un tracé circulaire continu derrière le gong, soit à peine à l’intérieur de l’aire rehaussée, soit sur le premier anneau d’accord (anneau « arc-en-ciel »), soit dans la zone brûlée du bord, jouer au dos du gong permet aussi de jouer à l’intérieur du bord recourbé, ce qui est inhabituel et demande un mouvement un peu différent mais produit un son intéressant.
Sur les gros gongs, jouer avec une baguette superball à large tête permet d’obtenir une note grave, concentrée et très puissante. Mais il est difficile de faire « parler » immédiatement le gong sur le bon partiel. Comme la « prise de corde », qui fait partie de la technique d’archet des instruments à cordes frottées, il faut trouver la bonne pression associée à la bonne vitesse pour démarrer proprement le son. J’ai trouvé une technique, qui demande de la pratique mais facilite néanmoins considérablement la reproductibilité d’un partiel : En faisant face au dos du gong, avec la main gauche, prendre une peau de chamois, et maintenir fermement le gong en tenant l’aire brûlée du bord devant le gong, de préférence au niveau de l’un des deux points d’attache de la corde de suspension pour plus de fermeté. Au dos du gong, au même niveau que la main gauche, appliquer solidement la baguette avec la main droite avec un tension importante. Commencer le mouvement, lentement et d’abord sans produire de son, puis augmenter la pression et légèrement accélérer le mouvement, jusqu’à ce que le son étouffé fasse entendre le début du partiel voulu. Lorsqu’il commence à sonner, continuer le mouvement de la main droite et libérer le gong de l’emprise de la main gauche. Le gong est maintenant sur le bon mode de vibration.
On peut aussi jouer avec plusieurs baguettes superball simultanément sur le même gong. Le son est peu prévisible, formant des accords de deux sons ou plus.
Ci-dessous, j’ai enregistré les neuf baguettes superball TTE Konklang sur chacun des sept gongs de ma collection, avec la poignée Vario OTG 5 juste à la base de la tête, en jouant à l’arrière du gong, au niveau du premier anneau d’accord, sur le cercle arc-en-ciel situé à la jonction avec la partie rehaussée, à l’exception de Sedna, pour lequel j’ai joué sur l’anneau brûlé.
Il semble que tant qu’il y a une certaine tension entre la poignée et la tête de la baguette, une même configuration (diamètre de la tête + longueur de la tige de la baguette) a tendance à exciter plus ou moins les mêmes partiels indépendamment du gong, du moins au début, avant de s’ajuster au potentiel du gong. Sur le petit gong Accent 22", on note toutefois une moins grande présence, et un son globalement plus creux. Mais, les gongs comportant de très nombreuses fréquences, certaines fréquences ont plus de sympathies que d’autres ; il serait donc plus intéressant de chercher la ou les meilleure(s) configuration(s) pour une baguette donnée sur un gong donné, ce que permettrait déjà dans une large part une investigation de la longueur optimale entre la poignée et la tête pour chaque baguette et pour chaque gong.
L’occasion idéale de découvrir quelques-unes des possibilités du jeu par friction
d’une baguette superball sur la surface du gong !
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