1963 : Anthony DONATO — Preparing Music Manuscript: A Detailed Guide and Reference to Manuscript Writing Procedures from Calligraphy to Copyright
Introduction
Après avoir clôturé, dans notre précédent article, la Première grande Partie de notre corpus de textes — Perspectives Historiques — La Gravure Musicale —, nous inaugurons dans le présent article les premières notes de lecture de notre Deuxième grande Partie : La Période Intermédiaire — La Copie Manuscrite de Partitions.
Dans ce quatrième épisode de la Série Notation & Gravure Musicales au Fil du Temps, nous allons donc enfin franchir le pas du milieu du XXè siècle, pour nous intéresser à un ouvrage non dépourvu d’intérêt, œuvre d’un certain Anthony Donato, publié pour la première fois en 1963 et republié de nombreuses fois et sous différentes formes : Preparing Music Manuscript: A Detailed Guide and Reference to Manuscript Writing Procedures from Calligraphy to Copyright (Préparation d’un Manuscrit Musical : Un Guide Détaillé et une Référence aux Procédures d’Écriture de Manuscrits, de la Calligraphie au Droit d’Auteur).
Un livret de langue anglaise, donc, ce qui n’a rien d’étonnant étant donné le sujet de niche qu’il aborde (mais également le peu de formation que nous recevons hélas en ce domaine dans les cours de nos conservatoires, pourtant saturés de cours en tout genre).
La copie dont j’ai fait l’acquisition est une édition à moindre coût, d’assez grand format et à couverture souple, mais tout à fait suffisante pour notre usage de lecture critique.
Le nombre de pages est toutefois trompeur, à cause de la mise en pages ici très condensée (autour de 80 pages), l’édition originale étant nettement moins compacte et approchant des 200 pages. Toutefois, mon exemplaire est bien une édition intégrale, seuls les artifices de mise en pages y sont pour quelque chose dans la condensation du propos.
La couverture a même le mérite de nous présenter la photographie d’un copiste musical bouclé (ce qui me ferait dater, au pifomètre, cette ré-édition aux années 1970), penché sur sa table de travail, ce qui nous donne une meilleure idée de l’environnement de travail d’un copiste à cette époque, quoique nous ne puissions exclure que cette représentation soit peut-être quelque peu idéalisée.
Au dos de l’ouvrage, l’éditeur nous gratifie d’une publicité pleine page sur toute la quatrième de couverture, proposant au lecteur des fournitures musicales telles que cahiers de papier à musique à spirales ou papier pour manuscrit, mais aussi des fournitures plus spécifiques, comme de la bande adhésive pour apporter des corrections.
Préface
Dans la préface, Anthony Donato nous explique que le Guide que nous tenons entre nos mains est le fruit des multiples questions ne manquent pas de revenir inlassablement quant à la préparation et la copie d’un manuscrit de musique.
Il présuppose que le lecteur sera un minimum familier avec la théorie musicale de base, et que l’ouvrage ne saurait prétendre au titre de méthode ou formation à la copie musicale.
Les pratiques exposées dans l’ouvrage sont toutes des pratiques adoptées par les éditeurs de musique établis et ayant pignon sur rue.
Par ailleurs, l’auteur indique que la plupart de ses observations s’appliquent tout autant au travail de copie manuel de partitions de musique qu’au moyen d’une machine à écrire la musique. C’est d’ailleurs ainsi que l’on mesure les 15 années écoulées depuis ►le Traité précédent, celui de Karl Hader◄, puisque la machine à écrire la musique semble avoir conquis une certaine place dans le métier ; suffisante, en tout cas, pour que l’auteur la mentionne explicitement.
Table des Matières & Chapitre 1 : Arguments en Faveur de la Clarté
S’ensuit une Table des Matières, avant que le livre ne s’ouvre sur un court chapitre en guise d’introduction, intitulé Arguments en Faveur de la Clarté.
Dans celui-ci, Anthony Donato souligne l’importance de la copie musicale pour tout musicien : étudiants, compositeurs, y compris les compositeurs établis. En cause, les coûts croissants de préparation des manuscrits musicaux pour publication.
Il insiste sur l’importance de la préparation correcte d’un bon manuscrit, qui ne peut que retenir favorablement l’attention envers un compositeur soumettant son œuvre à un chef d’orchestre, musicien-interprète ou lors d’un concours de composition. À l’inverse, combien de mauvaises impressions forgées à cause d’un manuscrit médiocres ?
Un manuscrit propre et lisible est avant tout un acte de courtoisie et de respect envers l’interprète.
Anthony Donato en profite pour basculer sur les aspects techniques d’un manuscrit agréable à lire. Comme je le fais moi-même souvent, l’auteur déplore l’approximation et le manque de soin et de connaissances générales de la plupart des manuscrits : par négligence, par méconnaissance musicale, ou encore par désinvolture et le fameux : « Ça fera bien l’affaire ».
La perfection, rarement atteinte en cet art de la préparation musicale, doit néanmoins servir d’idéal pour guider les pas du copiste, en cherchant le point d’équilibre entre clarté, aspect engageant et rapidité de copie.
La copie autographe la plus soignée, obtenue en traçant toutes les lignes à la règle et en se servant des divers guides, est une espère rare, à la fois pour des contraintes de penchant et de temps, réservée habituellement aux partitions destinées à la publication. Mais le manuscrit écrit à la main, à condition de satisfaire aux exigences requises de clarté et de conformité technique, peut intrinsèquement posséder lui-même quelque valeur.
Pour les personnes désireuses de prétendre à la qualité des meilleures partitions publiées, il faudra recourir au procédé autographe ou à l’utilisation d’une machine à écrire musicale. Dans tous les cas, primera la nécessité de transmettre correctement l’intention de l’idée musicale sur le papier.
Chapitre 2 : L’Équipement du Copiste
Dans ce chapitre, comme on peut s’y attendre à la lecture de son titre, Anthony Donato dresse la liste du matériel essentiel ou facultatif nécessaire à tout copiste musical sérieux.
L’auteur évoque donc le papier à musique, dont l’opacité, la texture et la densité sont des critères importants. Pour le travail sur calque, les portées sont généralement imprimées sur une face, et la musique réalisée sur l’autre face, afin d’éviter d’endommager les lignes de portées en cas de correction.
Il continue avec l’encre, toujours noire (et non bleu-noir), qui dépendra en partie de l’usage et du type de travail : sur papier ou sur calque, pour la reproduction ou non.
Il poursuit avec les stylos divers, dont les caractéristiques de la plume sont importantes pour la production d’une copie musicale satisfaisante.
Viennent ensuite les ustensiles de nettoyages de stylo puis les règles. Anthony Donato donne d’ailleurs une méthode intéressante pour séparer facilement un système en un certain nombre de segments (qui seront certainement toujours des mesures) égaux. Bonne astuce !
Qui dit copie musicale, particulièrement à la plume, induit correction des fautes inévitables : la gomme est un outil indispensable, mais toutes ne se valent pas. Quant à effacer l’encre, voici une action que la plupart d’entre-nous n’aurons sans doute jamais accomplie !
Pour les erreurs trop larges, mieux vaut découper une rustine sous la forme d’un morceau de papier qui sera précautionneusement positionné sur la feuille d’origine, la colle ou le scotch utilisé étant de qualité critique. Les corrections d’ampleur sont toutefois plus difficiles sur calque, où la moindre irrégularité dans la transparence pourrait apparaître lors du processus de reproduction.
L’auteur continue en évoquant les dispositifs de lettrage, qui permettent, pour les indications d’interprétation, les titres, les paroles de chant et toute autre information textuelle, d’obtenir une apparence plus uniforme, plus régulière : machine à écrire, tampons à imprimer en caoutchouc ou guides spéciaux de type pochoir. Ces derniers existent aussi à l’époque pour les principaux symboles musicaux.
Pour la réalisation de certaines parties du travail, le copiste aura également besoin de guides pour les courbes de toutes sortes (notamment les liaisons).
Pour réaliser la division harmonieuse des mesures (et quelquefois certaines longues liaisons), l’apprenti-copiste musical aura besoin de divers compas (il est question par exemple de « dividers », qui est une variété de compas).
Enfin, Anthony Donato ferme ce chapitre par la mention des machines à écrire la musique. D’après lui, la manipulation d’une machine à écrire la musique est plus lente que la rapidité d’un copiste à la main, mais mise entre les mains d’un bon opérateur, le travail résultant peut approcher la qualité de la gravure.
Chapitre 3 : Notation Générale
Ce chapitre ne présentera guère d’intérêt à tout musicien, compositeur, arrangeur, orchestrateur ou copiste possédant déjà les bases de la notation, mais pourra présenter un rappel synthétique de quelques éléments de base.
En effet, Anthony Donato expose rapidement les exigences liées aux :
- barres de mesures (l’épaisseur des barres de mesures devrait être approximativement le double de celle des hampes),
- crochets et accolades,
- clefs,
- armures et chiffrages de mesures,
- têtes de notes,
- points de prolongation,
- lignes supplémentaires,
- hampes et voix,
- crochets (les drapeaux en bout de hampe, pour la famille des croches isolées),
- ligatures,
- table des divisions des principales valeurs de notes,
- chiffres accessoires (en fait les chiffres par lesquels l’auteur désigne les n-olets : pour l’auteur, au début d’un passage de n-olets similaires, il est amplement suffisant d’indiquer seulement les premiers chiffres de n-olets, ce qui peut se comprendre du point de vue de la copie à la main, mais cette convention me paraît aujourd’hui à éviter à tout prix pour éviter la moindre confusion, surtout avec nos temps de répétition amoindris d’année en année),
- silences,
- syncopes,
- abréviations et signes de répétition et reprise (y compris les différents types de trémolos),
- altérations,
- symboles d’arpégé,
- changements de clef,
- changements d’armure et de chiffrage de mesures,
- annotations d’interprétation (tempo, mouvement métronomique, ornements, nuances, articulations, points d’orgue, glissandos),
- trilles,
- liaisons de phrasé (liaisons d’expression, mais ici aussi liaisons de prolongation),
- Signes de Repère (l’auteur indique la pratique de numéroter toutes les 10 mesures : je ne saurais m’ériger trop catégoriquement contre cette pratique contre-nature et contre-productive, anti-musicale au possible à mon avis. Pour moi, cette manière de numéroter les mesures est absolument proscrite. Point final).
Un chapitre que le lecteur averti pourra donc probablement sauter, mais qui fournit toutefois un aide-mémoire ou une introduction aux rudiments de la notation musicale pour les autres.
Chapitre 4 : Notation Particulière pour des Domaines Spécifiques
Dans ce chapitre, l’auteur s’intéresse à certaines notations plus spécifiques, par exemple à un instrument donné.
Ainsi Anthony Donato nous parle-t-il de :
- Harpe et Instruments à Clavier : arpégés, ligatures inter-portées, portées supplémentaires, glissandos, harmoniques, indications de pédales, registrations des orgues, symboles de répétition, liaisons, sélection de la portée, résonances par sympathie du piano, clusters des instruments à clavier ;
- Instruments à Cordes Frottées : unissons alternés, coups d’archet, divisi, harmoniques, notes aiguës, signes divers, sourdines, pizzicato, indication de corde, trémolos d’archet et trémolos doigtés ;
- Bois et Cuivres : armures (généralement omises à l’époque, ce qui est d’ailleurs toujours d’actualité à ce jour), notes aiguës, legato, sourdines, partage de portées à plusieurs instruments, articulation ;
- Percussion : clef pour les instruments à son indéterminé, armures, indications diverses, roulements, trémolos, trilles (l’auteur attire très justement l’attention sur la différence entre un trille ou roulement continu et un trille ou roulement ré-attaqué), placement des portées de percussion dans la nomenclature ;
- Musique Vocale : crochets et ligatures, annotations d’interprétation, liaisons, texte des paroles, narration et voix parlée.
Ici encore, rien que ne connaîtra déjà le compositeur ou le copiste pleinement formé, mais ici encore, un rappel synthétique qui pourra toujours s’avérer utile de temps à autre.
Chapitre 5 : Espacement et Alignement
Le Chapitre 5 traite enfin de la répartition des signes musicaux sur la page. D’après Anthony Donato, la clarté d’une partition repose en grande partie sur l’espacement et l’alignement.
Pour lui (et je suis tout à fait d’accord avec l’auteur sur ce point), le degré de précision, le temps et le soin consacrés à cette tâche dépendent en grande partie de l’utilisation prévue de la partition copiée : publication ou copie propre mais à terminer dans un laps de temps très court (note personnelle : c’est le cas de la musique commerciale, par exemple).
La planification s’effectue ensuite, système par système, en veillant à la répartition égale des notes à l’intérieur des mesures, sur toute la largeur du système (attention aux mesures inégales en durée !). Le copiste débutant aura besoin de mesurer précisément, alors que bien souvent, le copiste éprouvé saura positionner les éléments intuitivement, en grande partie « à l’œil ».
Dans tous les, l’auteur indique que dans le cas des partitions manuscrites, il est préférable de pécher par excès d’espace que par excès de compression (et j’ajouterai que c’est probablement de là que vient la mode des partitions — notamment les parties séparées — bien trop lâches, avec beaucoup trop d’espace blanc, à la fois dans l’horizontalité et la verticalité ; c’est un défaut selon moi que l’on trouve souvent dans la copie de musique commerciale, quoique cela puisse s’expliquer par la nécessité de laisser quelque espace pour les annotations diverses et les corrections éventuelles à la volée).
Trouver les proportions justes entre les différentes valeurs de notes dans l’horizontalité est une qualité cruciale pour transmettre une idée de l’écoulement du temps à l’interprète, en particulier à la lecture à vue. L’alignement vertical est également indispensable pour une lisibilité immédiate : ce qui doit tomber ensemble, temporellement parlant, doit être parfaitement aligné verticalement.
Chapitre 6 : Mise en Pages pour la Musique Instrumentale
Dans ce chapitre, Anthony Donato aborde les caractéristiques et particularités de mise en pages pour les parties séparées destinées à divers instruments, en nous donnant des exemples tout à fait explicites. Comme le reste du livre, c’est une section très visuelle, ce qui facilite nettement la compréhension.
- Harpe & Instruments à Clavier : Célesta, Harpe, Clavecin & Piano Solo, 2 Pianos, Piano 4 Mains, Orgue ;
- Autres Instruments Solos : non-accompagnés (la plupart des parties instrumentales sont préparées en n’indiquant pas l’accompagnement), avec accompagnement de Piano ;
- Musique de Chambre sans Piano : duos, trios, quatuors, quintettes, sextuors, plus grands ensembles ;
- Musique de Chambre avec Piano : trios, quatuors, quintettes, sextuors, plus grands ensembles mixtes ;
- Grands Ensembles :
- Orchestre : ordre de la nomenclature, recommandations sur le format et le choix du papier, parfois pré-imprimé avec des nomenclatures diverses, instruments de doublure, répartition des Cors, Trompettes, Trombones, partie de Timbales distincte et et toujours séparée de celles des percussions, divisions de Cordes, particularités des armures de Cor, usage de plus en plus répandu de chiffrages de mesures élargis, indications de tempo, indications de « à défaut » pour remplacer un instrument, omission des portées vides sur le conducteur, séparateurs de systèmes comme je le recommande moi-même, c’est-à-dire de part et d’autre de la page, et non seulement à gauche ;
- Orchestre de Théâtre (que l’on traduirait probablement plutôt par « Orchestre de Fosse », équivalent de « Pit Orchestra ») : particularités, autrement, les règles directrices des partitions d’orchestre habituelles s’appliquent ;
- Orchestre sous forme de Partition Condensée (que nous pourrions appeler « particelle ») : utilisé surtout pour la musique pédagogique et la musique commerciale, comparable aux « sketchs » qu’utilisaient parfois les compositeurs de musique de film à l’ancienne tels que John Williams pour écrire leur partition et la transmettre à leurs orchestrateurs ;
- Orchestre d’Harmonie (dans sa forme « Concert Band » plutôt que « Marching Band », qui indique plutôt une fanfare) : nomenclature de ce type d’orchestre mouvante et pas encore clairement fixée, et autres considérations assez proches de ce que l’auteur a déjà indiqué pour les partitions d’orchestre, à quelques particularités près, par exemple le fait que ce type de partition se prête moins souvent à l’omission des portées vides ;
- Orchestre d’Harmonie sous forme de Partition Condensée (« particelle ») : beaucoup plus courant et beaucoup plus répandu que pour les partitions d’orchestre, parfois même la seule partition, et souvent, les éditeurs publient les deux types de conducteur ;
- Solos Instrumentaux accompagnés par de Grands Ensembles (par exemple dans les Concertos) : parties solistes placées juste au-dessus des Cordes Frottées dans la nomenclature ou, pour les partitions d’Orchestres d’Harmonie, juste au-dessus de la famille des Cuivres.
Chapitre 7 : Mise en Pages pour la Musique Vocale
- Chants/Chansons Solos : pour la musique vocale, Anthony Donato recommande du papier à musique spécifique, expressément prévu pour la musique vocale, avec davantage d’espace entre la portée de Chant et la portée de Piano, pour accommoder l’espace nécessaire au texte des paroles chantées ;
- Musique Chorale : remarque notamment à propos des clés utilisées pour les parties de Ténor. De préférence, chaque type de Voix sur sa propre portée, de l’aigu au grave, mais parfois, regroupement sur 2 portées des Voix de Femmes et Voix d’Hommes. Par ailleurs, pour faciliter le travail de répétition et d’assimilation, l’auteur recommande d’inclure en bas de système une réduction pour Piano du Chœur — à moins, bien sûr, que l’œuvre ne dispose déjà d’un accompagnement dédié. Pour les parties vocales ouvertement solistes, il faut placer celles-ci au-dessus du Chœur dans la nomenclature.
- Voix accompagnée par un Petit Ensemble de Musique de Chambre : s’il y a des Corde Frottées, la portée de Voix soliste se place au-dessus des Cordes ; autrement, si l’ensemble ne comporte des instruments que d’une seule famille, la portée de Voix soliste se place au-dessus.
- Voix accompagnée par un Grand Ensemble : la portée de Voix soliste se place, comme pour n’importe quelle partie soliste dans une nomenclature d’Orchestre, au-dessus des Cordes Frottées ou, dans une partition d’Orchestre d’Harmonique, entre la famille des Bois et des Cuivres.
Chapitre 8 : Extraction des Parties Séparées
Anthony Donato insiste sur l’importance de parties séparées convenablement préparées.
L’auteur recommande ensuite plusieurs formats de page, en fonction du type d’ensemble. Naturellement, toutes les considérations d’espacement et d’alignement déjà évoquées au Chapitre 5 entrent ici en ligne de compte. Chaque instrumentiste doit disposer de sa propre partie séparée : ainsi Flûtes 1 et 2 doivent chacune avoir leur propre partie.
L’auteur souligne l’importance de l’étiquetage correct de repères tout au long de la partition, expliquant que les numéros de mesures sont plus pratiques pour évaluer et identifier les mesures manquantes lors de la relecture, et que le système de numérotation de 10 mesures en 10 mesures lui paraît le plus commode. Une fois encore, je m’érige résolument contre cette pratique ! Non, non et NON !
Pour moi, il est indispensable d’utiliser à la fois les numéros de mesures (au début de chaque système ou, pour la musique commerciale, pour chaque mesure) et les Repères sous forme de lettres, afin de bien les distinguer l’un de l’autre : cela donne un outil de répétition précieux pour le chef d’orchestre.
En revanche, je le rejoins lorsque il insiste sur la nécessité d’inclure tous les Repères sur chaque partie séparée, même si cela implique de séparer en deux une période prolongée de silences multi-mesures.
Bien sûr, prendre en charge les tournes de pages est indispensable : le copiste doit identifier et planifier sa mise en pages de telle sorte que les tournes tombent sur des silences en laissant, au besoin, plusieurs portées vides s’il le faut, afin de satisfaire cet impératif qui doit prévaloir sur tout le reste. C’est un point légèrement moins critique pour les pupitres de Cordes Frottées, qui se partagent un pupitre à deux.
Anthony Donato évoque aussi la numérotation des pages, la pagination gauche-droite et les répliques pour donner des repères d’orientation au musicien-interprète.
Chapitre 9 : Reproduction et Reliure
L’auteur souligne ensuite les récentes évolutions des méthodes de reproduction dans les années passées, facilitant et réduisant les coûts de duplication des partitions. Les procédés disponibles alors permettent enfin de satisfaire les besoins tant des professionnels, compositeurs, arrangeurs, que des professeurs, étudiants et éditeurs.
Il passe ensuite en revue les différents procédés de reproduction qui s’offrent à l’époque au copiste : procédé diazoïque (diazocopie/diazographie), duplicateur à alcool (rouleau de duplication carbone, familier sans doute de tant d’entre-vous et réminiscent de vos années d’école primaire : Ah ! L’odeur de l’alcool sur le carbone…), photocopie, thermographie, procédé électrostatique, impression « offset », impression photostatique, xérographie (électrophotographie).
Qui dit tirage, dit également reliure. Anthony Donato décrit le pliage en accordéon, l’agrafage (et « saddle stitching »), anneaux plastiques ou métalliques, ruban adhésif en tissu (l’une des meilleures méthodes de reliure d’après l’auteur).
Anthony Donato clôt le chapitre en recommandant plusieurs services de reproduction et reliure, la plupart dans région de New York City.
Chapitre 10 : Relecture
Probablement le chapitre le plus intéressant de ce livre, car c’est aussi un sujet trop souvent traité de manière elliptique selon moi.
Ici, Anthony Donato consomme plusieurs pages de papier à traiter exclusivement et expressément de ce sujet.
Il insiste sur l’importance d’un travail de relecture soigneux, comme je le fais souvent avec mes étudiants, seul à même d’identifier des fautes plus ou moins criantes, plus ou moins subtiles, avant que la partition ne se retrouve sur le pupitre du musicien et où le moindre changement entraîne perte de temps, et donc, perte d’argent ou perte de temps de répétition.
La concentration lors de l’étape de relecture est la clé de la réussite de cette opération. Et c’est épuisant (je recommande des pauses fréquentes et régulières). C’est d’autant plus important si vous ne disposez pas d’un relecteur extérieur et que vous devez vous charger vous-même de cette partie du travail.
Quoi qu’il en soit, vous mettrez dans de bien meilleures dispositions vos musiciens si vos partitions sont exemptes de fautes, alors qu’à l’inverse vous les agacerez d’emblée si chaque mesure s’ornemente de corrections à la volée pour des fautes qui auraient dû être éliminées avant la livraison de la partition.
Anthony Donato nous présente une table des signes utilisés par les relecteurs-correcteurs de l’époque pour reporter les fautes et erreurs sur les épreuves de correction. Il nous livre également sa manière d’annoter l’épreuve de travail afin d’identifier clairement, et sans risque possible d’omission ultérieure, toute faute relevée dans la partition.
Si ce chapitre est court, il justifie à lui seul — à mes yeux — l’intérêt de ce livre. En effet, que vous graviez au poinçon vos partitions sur plaque métallique (et si c’est le cas, ne manquez pas de me contacter s’il vous plaît !), que vous les copiez à la main à la plume calligraphique ou au crayon de papier (moins recommandé toutefois que le travail à l’encre, à cause de l’effort de pression qu’il suppose de la part de la main), ou encore que vous travailliez sur ►un logiciel de notation musicale moderne tel que Dorico◄, ce chapitre était à l’époque et reste aujourd’hui entièrement d’actualité.
Vous ne pouvez donc qu’enrichir votre savoir-faire et élargir vos compétences de copiste en le lisant au moins une fois, puis en faisant une habitude de pratiquer une relecture attentive de tous vos travaux de copie musicale. Grâce à la technologie, vous pouvez bien sûr y ajouter la prévisualisation audio (lecture de la partition), avec des sonorités d’instruments virtuels, de toute la nomenclature instrumentale, ou par famille d’instrument, voire instrument par instrument.
Et avec ►Dorico 5, la « Lecture Balayée » (Lecture « Scrub »)◄ vous permet même d’aller plus loin et d’atteindre une granularité plus fine en restant et faisant entendre indéfiniment une position rythmique donnée, ou en navigant en avant ou en arrière à n’importe quelle vitesse — mais ceci est un autre sujet.
Chapitre 11 : Copyright
Le Chapitre 11 décrit dans les grandes lignes les lois en vigueur aux États-Unis d’Amérique en ce qui concerne le copyright, le fameux petit symbole d’un « c » minuscule encerclé : ©
La perspective ici est un peu datée, historiquement et géographiquement, mais présentera un certain intérêt pour qui ignore tout de ce sujet.
Annexes, Index & Index des Signes Musicaux
Le livre se termine avec quelques annexes très pratiques en 4 langues (anglais, italien, français et allemand) :
- les degrés de la gamme,
- les noms d’instruments et des voix,
- les ambitus des instruments et des voix,
- les termes musicaux courants pour les instruments,
- et enfin, les termes musicaux de langue étrangère (surtout en italien).
Les annexes sont suivies d’un index, y compris d’un index des symboles musicaux (celui-ci placé en début d’ouvrage en fonction des éditions, ce qui est le cas dans la mienne).
En Conclusion : Mon Avis sur ce Livre
Ce guide pratique de 1963, sans prétention et certes un peu désuet, est probablement l’un de mes préférés. Quoique incomplet, comme tous les guides de ce genre, il aborde avec le juste niveau de détail à mon avis la plupart des problématiques que peut rencontrer le copiste dans son travail.
Pour un débutant, il me semble que ce livre peut offrir un bon point de départ, qui ne viendra pas submerger ni saturer d’informations superflues l’apprenti-copiste.
Par ailleurs, si les chapitres sur l’équipement du copiste et les procédés de reproduction ont nécessairement vieilli depuis 1963, les informations sur la reliure restent en grande partie valables aujourd’hui (bien qu’Anthony Donato ne parle pas des reliures en véritables spirales hélicoïdales « coil », sans doute inventées plus tardivement), et le chapitre sur la relecture n’a pas pris une ride.
D’autre part, les exemples musicaux, présentés via des figures musicales copiées à la plume calligraphique, et toutes les tables de noms, d’ambitus et de symboles, donnent un accès facile à tout un tas d’informations, ce qui pourra constituer une base de référence solide, accessible et toujours à portée de main.
Je recommande vivement cet ouvrage. Le musicien d’aujourd’hui n’aura aucun mal à transposer la plupart des savoirs qu’il y trouvera dans son logiciel de notation musicale, exception faite des sections dépassées, déjà mentionnées plus haut.